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6 août 2010 5 06 /08 /août /2010 18:09

 

Une nouvelle contribution de Gilbert Dubant


 

 

Inlassablement, Sarkozy et Hortefeux passent des couches de bêtises anticonstitutionnelles sur le moindre fait divers où l’on trouve du Samir ou du Mamadou : déchéance de nationalité, condamnation des parents, quoi de plus ? On leur fait confiance.

Évidemment, les medias qui emploient des réacs professionnels ou des perroquets stagiaires reproduisent, y compris les pires inepties. Au tableau d’horreur, les « gens du voyage » font bonne figure, dans la série « On mélange tout et on recommence… ».

 

DES ROUMAINS SANS CARAVANES

 

Premier épisode récent : des Français vivant en caravane saccagent une gendarmerie à Saint-Aignan-sur-Cher parce qu’un de leurs cousins a pris une balle dans la tête en forçant un barrage de gendarmerie. L’affaire est vite réduite après l’enterrement et on passe à un sujet plus large : les camps pour « gens du voyage ». Comme ces Manouches, Sintis et autres Gitans sont Français depuis des générations et ont des associations de défense qui risquent de faire voter, il faut trouver un autre gibier. On va donc laisser des questions gênantes comme « Comment fait-on pour acheter une berline Mercedes qui tracte une caravane Fendt pour huit personnes quand on change de domicile toutes les trois semaines ? ». On  imagine un sympathique agent du fisc posant la question à l’heure de l’apéro et repartant gratuitement à bord d’un Samu.


Heureusement, nous avons les Roms, qui ne sont même pas Français et qui squattent les friches des banlieues pourries. Et les medias en rajoutent dans l’ignorance du vocabulaire et de la réalité. Petit essai de clarification.

Ils sont Roumains, ne s’appellent pas Roms, mais Tziganes* («  Tsigani », en roumain) et seraient environ 15000 (chiffre impossible à vérifier) dans l’Hexagone, avec réassortiment régulier. En Roumanie, les chiffres varient entre 450 000 (dernier recensement, mais l’INSEE n’est pas là) et deux millions. On en trouve également en Bulgarie, Hongrie, Balkans.

 

LE RACISME ET LA BOUE

 

Quand on regarde leurs campements en région parisienne, on est pris entre deux sentiments : la honte de laisser vivre des êtres humains dans de telles conditions et l’incompréhension devant leur mode de vie et les raisons de leur présence. Pourquoi diable sont-ils venus ? Pourquoi ne pas chercher des ressources dans le pays d’origine ?


rom01En Roumanie, le racisme est généralisé et un parti comme « Romania Mare » (Grande Roumanie), expansionniste et fascisant, ferait passer Le Pen pour un modéré. Réflexion entendue chez un « intellectuel » francophone  et francophile: « Je ne comprends pas pourquoi vous acceptez tant de Nègres en France… » À propos des Tziganes, une professeure de biologie : « Il faut les gazer comme des poux… ». Hitler pas mort ?


Côté Tzigane, la cause n’est pas facile à défendre. Emir Kusturica et Tony Gatlif sont des cinéastes de talent, mais « Gadjo Dilo » est aussi vraisemblable que Spiderman. Les Tziganes roumains, tous sédentaires, vivent dans des villages dont la caractéristique est la crasse. C’est en cela qu’ils se différencient des villages non-tziganes, qui ne connaissent pourtant l’assainissement que par la télévision. Un exemple : en Transylvanie, sur les quelque 35 km qui séparent Alba Iulia de Zlatna, il y a sept villages, dont un tzigane. C’est le seul où l’on peut voir des enfants en bas âge se rouler nus dans un fossé rempli d’une boue sombre qui sert de fosse non septique et de décharge publique en attendant le prochain orage. S’ils ne sont pas villageois, ils s’agglutinent dans les faubourgs-bidonvilles de Bucarest ou Brasov, où ils se livrent à leurs activités traditionnelles : le vol et la mendicité.

 

LA MAUVAISE RÉPUTATION

 

rom02On trouve quelques exceptions à la piatsa rousa (marché russe, marché aux voleurs). Les caïds tziganes sont reconnaissables à la Mercedes ou la BMW, aux énormes bijoux en or, gourmettes, chaînes, bagues, et aux activités : trafic de devises (euro, dollar, rouble, etc), de filles, d’armes, principalement.

Circonstances aggravantes pour le Roumain moyen : ils sont réputés (à mon avis de façon exagérée) d’avoir été les nervis de la  police politique de Ceausescu, la Securitate, d’estropier volontairement les jeunes enfants mendiants pour mieux apitoyer, et de pratiquer le viol et l’inceste. Ajoutons un taux d’alphabétisation pitoyable, dû à la fois au rejet de l’école par les familles tziganes et au rejet des enfants tziganes quand ils s’y aventurent, et l’on comprendra un peu mieux pourquoi leur pays ne leur semble pas paradisiaque. Pour être juste, leurs concitoyens « normaux » leur reconnaissent un seul talent : la maîtrise du violon.


Pourquoi viennent-ils en France ? En Roumanie, notre pays a une réputation exagérément flatteuse : riche, hospitalier, magnifique, etc. Le français est la première langue étrangère enseignée et la plupart des élites sont francophones. Bref, Cocagne et sa banlieue.


C’est justement dans cette banlieue qu’ils arrivent, mais ce qui nous semble une poubelle à ciel ouvert est leur environnement en Roumanie, parfois en pire. La France est excellente. Il faut rester, d’autant plus que la police française, comparée à sa collègue roumaine, est une œuvre de bienfaisance.

 

Y A-T-IL DES SOLUTIONS ?

 

rom03Ils ont vite compris que la Roumanie est entrée dans l’Union Européenne et qu’ils en sont par conséquent citoyens. Et si le gentil président Sarkozy veut les virer, on leur donne de l’argent pour revenir « back home ».En France, ce n’est pas le Pactole, là-bas, on vit plusieurs mois avec 1000 euros. Après, on refait le chemin en sens inverse, en attendant l’expulsion suivante indemnisée.


Ces conditions de vie humainement inadmissibles s’accompagnent d’un risque sanitaire : le suivi médical absent fait resurgir en France des maladies prétendument éradiquées, comme la tuberculose.


Que faire, au-delà des gesticulations de Sarkozy et d’Hortefeux ? Assurer un minimum d’hygiène dans les campements « sauvages » et aménager des aires d’accueil, avec des subsides minimum. Scolariser les enfants, ce qui sera très difficile au regard  de ce que rapporte une journée de vol à la tire sur les Champs-Élysées. Mettre en place des travailleurs sociaux bilingues.

Évidemment, le mode de vie français majoritaire est si éloigné du leur, par exemple le rapport au travail et la nécessité de formation, que tout cela n’est que vœux pieux aujourd’hui. Mais peut-on se contenter de hurler « Dehors ! » en sachant que c’est inutile ? Les Tziganes reviennent toujours sur les lieux de leurs primes.

 

Gilbert Dubant

 

 

 

* Les tsiganes forment un peuple indo-européen. Il s’agit des Kshattriyas qui, venus du nord de l’Inde, sont arrivés en Grèce au IXème siècle. Puis, au XIIIème siècle, les Rajputs les ont rejoints. Ensemble, ils ont formé la Romani Cel – le peuple tsigane – d'où leur surnom de "Romanichels", mais ils se nomment eux-mêmes Romané Chavé, c'est-à-dire "fils de Ram" (héros de l'épopée indienne Ramanaya). Comme les tsiganes n’ont pas d’État propre, ils sont dispersés non seulement à travers l’Europe, mais aussi en Amérique (Argentine, Brésil, Colombie, États-Unis). Bien qu’il n’y ait aucun recensement sur leur population, on estime leur nombre à environ 80 millions, mais la quasi-totalité des tsiganes ont perdu l’usage de leur langue ancestrale et se sont assimilés à leur pays d’accueil.

Les tsiganophones habitent surtout la Bosnie-Herzégovine, la Roumanie, la Pologne, la Hongrie, l’Albanie, la Grèce, la Slovaquie, l’Ukraine, le Portugal, l’Espagne, la Norvège, la Suède, la France, les Pays-Bas, l’Italie et l’Allemagne. On distingue le tsigane des Balkans (Serbie), le tsigane des Carpates (République tchèque), le tsigane finnois (Finlande), le tsigane sinté (Serbie), le tsigane gallois (pays de Galles), le tsigane valaque (Roumanie), le tsigane gréco-turc, etc. La langue que parlent les Tsiganes serait à l’image de l’itinéraire de leurs ancêtres: le romani paraît donc différent d’un pays à l’autre, très teinté de particularismes linguistiques, tout en conservant une certaine intercompréhension. On dénombre au moins une quinzaine de variétés de langues tsiganes:

http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/europe/tsiganes.htm

Voir aussi http://www.roumanie.com/Roumains-tsiganes_tziganes-A440.html

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