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6 février 2018 2 06 /02 /février /2018 09:52
Décriminaliser les drogues

La criminalité est la pire des calamités générées par le narcotrafic. La meilleure manière de le combattre est la dépénalisation des stupéfiants et une politique de santé pour les victimes de la drogue. C’est ce qu’affirme Mario Vargas Llosa en tant que membre de la Commission globale de politique en matière de drogues.

Décriminaliser les drogues

Cette commission, présidée par l’ex-chef d’état brésilien Fernando Henrique Cardoso, avec comme directrice actuelle Ruth Dreifuss, ex-présidente de Suisse, synthétisant les réflexions et travaux de politiques, fonctionnaires internationaux, scientifiques et intellectuels de divers pays, met en avant depuis 2011 des propositions en faveur d’une politique plus sensée et plus réaliste en matière de narcotrafic et de consommation de stupéfiants que celle de la répression policière et judiciaire.

Décriminaliser les drogues

La commission, s’appuyant sur des statistiques rigoureuses, des recherches sociologique et cliniques, a démontré sans équivoque que la prohibition et les lourdes sanctions, qui ont coûté des milliards de dollars, loin de réduire, ont au contraire abouti à une augmentation vertigineuse de la consommation de drogues dans le monde, accompagnée par la violence criminelle liée à leur production et distribution illégales. Presque partout dans le monde, et principalement en Amérique latine, les mafias de narcotrafiquants sont une plaie qui causent des dizaines de milliers de morts et sont une source de corruption qui pourrissent les institutions, infectent la vie politique, dégradent les démocraties.

Le dernier rapport de la commission s’efforce de combattre la perception négative et délictueuse que les gouvernants projettent sur tous les consommateurs de drogues sans exception, les présentant comme des déchets humains, que leur addiction pousse au délit, et qui sont donc des menaces vivantes pour l’ordre et la sécurité de la société. Or les raisons qui poussent à consommer des « substances psychoactives » dont très diverses, et, dans certains cas, parfaitement justifiées. Par ailleurs, parmi les drogues il y a des différences énormes quant aux conséquences qu’elles ont sur l’organisme, de l’héroïne aux effets extrêmement pernicieux jusqu’à la marihuana qui fait moins de dégâts que l’alcool.

Décriminaliser les drogues

Le rapport met en relief le fait paradoxal que la stigmatisation sociale et morale des drogués les pousse à une auto-culpabilité qui aggrave chez eux la nécessité de recourir à une manière artificielle de se retrouver en paix avec eux-mêmes. Les statistiques montrent qu’il y a proportionnellement plus de personnes qui se libèrent de leur addiction à la drogue dans les sociétés ouvertes et tolérantes que dans celles où règne une politique de répression systématique.

La Commission reprend donc ses recommandations de dépénalisation des drogues et préconise que la répression cède la place à une politique de prévention et de tolérance. Si elle prône, comme en 2011, la légalisation, elle souligne qu’elle doit être accompagnée de campagnes de prévention actives comme celles menées sur le tabac, informant les citoyens sur les dangers des stupéfiants. Cette légalisation permettrait de stopper la criminalité qui est la pire des calamités engendrées par les drogues. Dans un pays comme le Mexique les luttes entre les puissants cartels qui se disputent le territoire causent des dizaines de morts chaque mois et pourrissent la vie politique par la corruption qui dégrade la démocratie.

Un des arguments opposé à l’idée de légalisation est qu’elle aurait un effet d’aimant sur la consommation, comme aux Pays-Bas, pays pionnier en ce domaine, avec le cannabis. Mais c’est un phénomène passager. Ainsi la nouvelle politique de légalisation en Uruguay ne semble pas avoir dopé la consommation ; et certains disent même que la disparition du tabou de la prohibition diminue le prestige du cannabis chez les jeunes.

Décriminaliser les drogues

Peu à peu, à travers le monde, il y a de plus en plus de gens qui, comme le préconise la Commission Globale de politique en matière de drogue, pensent que la meilleure manière de combattre les drogues et ses séquelles délictueuses est la décriminalisation. Un des plus grands obstacles est qu’il y a des milliers de milliers de personnes qui vivent de ce combat voué à l’échec.

Un des témoignages

Décriminaliser les drogues
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15 avril 2016 5 15 /04 /avril /2016 16:23

  Légalisez tout - Legalize It All – écrit  Dan Baum dans le Harper’s Magazine* d’Avril ! Car la guerre des drogues, déclenchée par Nixon-le-truqueur, a totalement échoué.

 

Bryan Lewis Saunders : autoportrait

Bryan Lewis Saunders : autoportrait

L’invention de la guerre antidrogue était une manoeuvre cynique de Nixon !

 

Comment les Etats-Unis se sont-ils empêtrés dans une politique de prohibition des stupéfiants qui a provoqué tant de souffrances et donné si peu de résultats ?

C’est le président républicain Richard Nixon, qui a déclaré la première guerre contre la drogue et a engagé le pays dans la voie répressive extrêmement contre-productive qu’il poursuit encore.

Vous voulez vraiment savoir ce qui s’est passé­?” [a dit en 1994 Ehrlichman, protagoniste du Watergate] . “Nixon avait deux ennemis ­: la gauche pacifiste et les Noirs. Nous savions que nous ne pouvions mettre hors la loi ni les manifestants contre la guerre du Vietnam ni les Noirs. Mais en associant dans l’esprit du public les hippies à la marijuana et les Noirs à l’héroïne, puis en les présentant comme de dangereux criminels, nous pouvions déstabiliser leurs communautés – arrêter leurs dirigeants, perquisitionner leurs domiciles, interrompre leurs meetings et les vilipender chaque soir au journal télévisé. Savions-nous que nous mentions sur leur rapport avec les drogues ? Bien entendu.

La dépendance aux drogues est certes effroyable, mais elle est rare.

Ce que nous craignons le plus en matière de drogues – la violence, les overdoses, la criminalité – provient de la prohibition et non des drogues elles-mêmes. Et nous ne pourrons jamais gagner sur ce front. Même l’agence fédérale de lutte contre le trafic de stupéfiants (DEA) admet que les drogues qu’elle cherche à éradiquer sont de plus en plus abordables et faciles à se procurer.

Quand on mène une guerre pendant quarante ans sans la gagner, il faut prendre le temps de réfléchir à d’autres solutions plus efficaces”, a déclaré le président colombien, Juan Manuel Santos.

Une commission de 22 experts médicaux réunis par l’université Johns Hopkins et la revue britannique The Lancet a rendu ses conclusions en mars dans un rapport : les politiques prohibitionnistes menées ces cinquante dernières années “ont directement ou indirectement contribué à des violences meurtrières, des maladies, des déportations de population, des injustices et ont miné le droit des populations à la santé”.

Le Washington Post a retenu quatre de leurs arguments :

– la croissance inquiétante des homicides au Mexique depuis que le gouvernement a décidé de mener une guerre militaire contre le trafic de drogue. Cette augmentation a été si importante qu’elle a grevé l’espérance de vie du pays ;

– l’incarcération excessive, premier facteur de contamination par le VIH et le virus de l’hépatite C chez les consommateurs de drogue ;

– la discrimination raciale induite par l’application des lois antidrogue, notamment aux Etats-Unis ;

– la violation des droits de l’homme dans l’application de mesures punitives, et notamment la torture et le mauvais traitement de prisonniers au Mexique.

Les experts appellent en conséquence à décriminaliser l’usage non violent et la possession de toutes les drogues et invitent les Etats à “basculer progressivement vers un marché régulé des drogues en appliquant une méthode scientifique pour leur évaluation”.

Ils insistent notamment, explique le Washington Post, sur la différence entre la simple consommation de drogue (drug use) et l’abus de drogue (drug abuse). D’après leurs estimations, 11 % “seulement” des consommateurs de drogue seraient réellement dépendants.

"49 % des détenus dans les prisons fédérales étatsuniennes en 2013 l’étaient pour des activités liées à la drogue"

Nous devons maintenant tenir compte du fait que Washington ne peut plus faire appliquer à l’intérieur de ses frontières ce qu’il prône à l’étranger” dit un expert. Vingt-trois Etats des EU, ainsi que le district fédéral de Columbia [la région qui englobe la capitale fédérale, Washington], autorisent la marijuana à usage thérapeutique et quatre autres – le Colorado, Washington, l’Oregon et l’Alaska – ont légalisé le cannabis. D’autres encore, dont l’Arizona, la Californie, le Maine, le Massachusetts et le Nevada, devraient soumettre la question à un référendum en novembre prochain.

Ainsi le Colorado, depuis 2000, autorise le cannabis thérapeutique, distribué à travers un système de dispensaires privés agréés. Puis, en novembre 2012, le cannabis à usage récréatif a été légalisé. Les citoyens du Colorado de plus de 21 ans pouvaient détenir et consommer du cannabis en toute légalité. Dans le Colorado, l’économie du cannabis légal commence déjà à ressembler à celle de l’alcool : les fumeurs quotidiens ne constituent que 23 % des usagers, mais consomment 67 % de la production. Le marché du cannabis, comme celui de l’alcool, repose essentiellement sur les gros consommateurs. En 2015, le Colorado a engrangé près de 135 millions de taxes sur la marijuana.

En Europe, Les Pays-Bas ont officiellement dépénalisé la consommation et la possession de cannabis en 1976, suivis de près par la République tchèque, l’Italie et l’Allemagne (et, hors d'Europe par l'Australie). Dans aucun cas le cannabis n’a posé de problème sanitaire ou sécuritaire significatif. Mais le cannabis étant une drogue douce qui ne provoque pas de dépendance physique.

Le Portugal, lui, a dépénalisé le cannabis, mais aussi la cocaïne et l’héroïne, ainsi que d’autres stupéfiants. La consommation des adolescents portugais a brièvement augmenté avant et après la dépénalisation, puis elle s’est stabilisée, sans doute lorsque l’effet de nouveauté est retombé. La consommation régulière de drogues dures a également régressé après la dépénalisation, passant de 7,6 ‰ à 6,8 ‰. Le nombre de prisonniers incarcérés pour des délits liés aux drogues a chuté de plus de moitié et ne représente plus aujourd’hui que 21 % des détenus. Comme le préconise le Rapport de la commission mondiale sur la politique des drogues, le Portugal a considéré les drogués dépendants comme des malades et a donc mis en place des programmes médicaux-sociaux.

Le fait que les pouvoirs publics tirent profit d’un produit qu’ils cherchent à décourager peut paraître hypocrite, mais c’est actuellement le cas avec le tabac, l’alcool et les jeux d’argent.

La vie de toxicomane est un parcours du combattant : trouver un dealer, négocier, trouver un endroit pour se shooter…” Si le système légal réglementé est bien pensé – pour que les drogues soient fiables, que la procédure ne soit pas trop lourde et que les taxes sur les produits ne soient pas trop prohibitifs –, les consommateurs finiront par le préférer au marché noir.

 

Une guerre lancée cyniquement par un politicien des plus pourris - Nixon - n'a abouti qu'à aggraver la situation en fragilisant notamment toute l'Amérique latine. Faut-il continuer, à coups d'affirmations mensongères comme celles de la Sénatrice Ghali, cette guerre nuisible ?

 

* D'après la traduction de COURRIER INTERNATIONAL du 14 avril 2016.

 

  Voir aussi Se rendre au lendemain : un rapport sur les politiques canadiennes sur les drogues

Ce rapport examine l’échec accablant des lois sur les drogues au Canada et fournit des recommandations concernant la façon dont nous pouvons améliorer la santé et la sûreté des Canadiens en matière de drogues.
Le rapport constate que l’application de la loi demeure la principale méthode utilisée au Canada pour remédier au problème de l’utilisation de drogues illégales, et que cette confiance excessive envers le système de justice pénale omet toutes les preuves recueillies à l’effet qu’une approche de santé publique face aux drogues serait plus efficace et avantageuse pour les canadiens.

 

Et voir la prise de position de Justin Trudeau

 

Une nouvelle note de TERRA NOVA

Contrôler le marché légalisé du cannabis en France - l'exemple fondateur de l'ARJEL -

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23 octobre 2015 5 23 /10 /octobre /2015 21:05
CANADA : Justin Trudeau un 1er ministre qui décoiffe

Le Parler vrai, il le pratique le leader d’un parti Libéral qui l’a emporté largement au Canada. Parler vrai et sans démagogie. Il l’a prouvé en prenant des positions courageuses sur le niqab ou la légalisation du cannabis. Mais aussi en annonçant qu’il assumerait un déficit budgétaire. Et que la Canada accueillerait plus de réfugiés syriens.

A l’issue d’une très longue campagne voulue par le 1er ministre conservateur sortant, Stephen Harper, Justin Trudeau l’emporte largement en multipliant pas cinq le nombre de députés du Parti Libéral.

Fils à papa, ce fut un handicap au départ qu’il sut transformer en atout. Son père, Pierre Eliott Trudeau, fut Premier ministre pendant 15 ans (1968-1979 et 1980-1984). Ce libéral a aboli la peine de mort, légalisé le divorce et décriminalisé l’avortement et l’homosexualité. En bref, il a sorti le Canada de son obscurantisme.

Son fils Justin est longtemps apparu comme un aimable héritier. Comme son père, il est un farouche adversaire des indépendantistes québécois. Mais son attachement aux réformes initiées par son père l’avait amené à déclarer face à la politique rétrograde de Harper « Si, à un moment donné, je croyais que le Canada, c’était vraiment le Canada de Stephen Harper, puis qu’on s’en allait contre l’avortement, contre le mariage gai, qu’on retourne en arrière de 10 000 façons différentes, peut-être que je songerais à vouloir faire du Québec un pays

Il n’est pas avare de dérapage verbaux – c’est d’ailleurs sur ses gaffes que comptait Harper pour le discréditer – et a fait preuve d’une totale décontraction. Ainsi de ce sketch de descente d’escalier en roulé-boulé dans une émission distractive. Mais aussi d’un combat de boxe avec un député conservateur au profit d’une œuvre caritative ce qui lui permet d’exhiber ses tatous. Moins heureuse fut cette carte de vœux où toute sa petite famille est vêtue de belles et chaudes fourrures, de quoi faire bondir les défenseurs de la faune sauvage.

Et sur deux sujets  clivants – où il risquait plus de perdre des voix qu’en gagner – il assume avec panache.

  “Je ne suis pas en faveur d’une dépénalisation du cannabis. Je suis pour sa légalisation.” Le leader libéral canadien Justin Trudeau, fils d'un ancien Premier ministre, a conté : « Nous dînions avec des amis, nos enfants étaient chez leur grand-mère et l'un de nos amis a allumé un joint qu'il a fait tourner. J'ai pris une bouffée ». “Ce n’était pas une erreur” (The Huffington Post, New York) Trudeau  a indiqué qu’il appuyait la légalisation de la marijuana pour mieux la réglementer et la taxer.

Harper, mais aussi le Bloc Québécois, souverainiste, ont tenté de focaliser la campagne électorale sur une affaire de niqab.

  Une Pakistanaise d'origine, Zunera Ishaq, a pu prêter serment de citoyenneté, à visage couvert, à Mississauga, en banlieue de Toronto. En effet, la Cour fédérale et la Cour d'appel fédérale lui ont donné raison sur la directive ministérielle visant à interdire aux femmes de prêter serment en étant voilées. Mme Ishaq a accepté de se dévoiler pour s'identifier- ce qu'elle avait déjà fait par le passé - mais disait ne pas comprendre pourquoi elle devrait montrer son visage à plusieurs personnes lors de la prestation du serment de citoyenneté.

Les conservateurs et les souverainistes du Québec prônaient l’obligation de prêter serment de citoyenneté à visage découvert et d’interdire le port du niqab aux fonctionnaires. Sujet en or, puisque l’opinion canadienne et particulièrement québécoise était massivement pour ce rejet du niqab.

 

Mais paradoxalement, ce fut le seul Thomas Mulcair, leader du parti Néo-démocrate (centre-gauche), qui ne s'opposait pas au niqab si la femme qui le porte accepte de s'identifier à visage découvert avant la cérémonie, comme le stipule la réglementation en cours, qui a sévèrement pâti de cette prise de position. Alors que Justin Trudeau, sur la même ligne, car pour lui l'enjeu constitue une question de protection des droits des minorités, s’en sort en attaquant bille en tête son adversaire : « M. Harper, je trouve que vous avez du cran (...) de parler de défense du droit des femmes. Il y a plus d'hommes dans votre caucus qui sont contre l'avortement que de femmes qui portent le niqab au Québec. »

 

Sa victoire il la doit bien à son charisme. Accueilli en «rock star», il signait des autographes à profusion, en plus de se prêter à des dizaines d’égoportraits par jour avec ses partisans. «Il faut aller cogner aux portes. Parlez à vos voisins, vos familles, vos amis», a-t-il scandé à ses militants.

Mais surtout il a débordé le parti d’opposition officiel, le NDP, en captant les voix de la classe moyenne, promettant en quelque sorte de faire payer les riches, de prendre l’argent des «plus nantis des nantis» pour le redonner aux moins nantis. Il l’a débordé aussi en osant annoncer un déficit budgétaire, face à un Harper fort de son équilibre. « Nous enregistrerons des déficits modestes pendant trois ans pour pouvoir investir dans la croissance de la classe moyenne. »

Et c’est sans doute son talent de débateur qui explique qu’il soit apparu comme l’incarnation du changement après dix ans de conservatisme : «On ne peut pas se permettre encore 10 ans avec le gouvernement Harper. Ce gouvernement est déconnecté et à court d’idées». «Vous savez ce que les gens disent là-bas de vos visites [dans le Grand Nord canadien], M. Harper? Ils disent que vous avez un gros traîneau, mais pas de chien!» Quand celui-ci prétend que des efforts sur le plan climatique ont été faits, il rétorque « Il dit que le Canada est un leader en matière d’environnement. Je pense qu’il commence même à se croire. » Des répliques qui font mouche.

  

 

Fils à papa et fier de l’être, il défend farouchement l’œuvre paternelle : « Pendant cette campagne, de manière directe ou indirecte, ces deux messieurs [Harper conservateur, Mulcair néo-démocrate] ont attaqué mon père. Et je veux être clair : je suis incroyablement fier d’être le fils de Pierre Elliott Trudeau. Et je suis chanceux qu’il m’ait légué ses valeurs. Quand on parle de son héritage, c’est d’abord celui de la Charte des droits et libertés, qui définit le Canada comme un pays qui défend les droits individuels, même contre les gouvernements qui veulent les enlever ; c’est celui du multiculturalisme […] et c’est celui du bilinguisme qui, selon mon père, voulait dire, M. Mulcair, qu’on dit la même chose en anglais et en français ».

Mais surtout, face aux conservateurs plus que frileux devant l’accueil des réfugiés, avec courage et conviction, il a rappelé dans un débat : « On a accepté des dizaines de milliers de personnes », citant l’arrivée d’Ukrainiens, de Hongrois, de Vietnamiens ou encore d’Israéliens. À Toronto même — où était organisé le débat—38 000 Irlandais ont débarqué au XIXe siècle, en fuyant la famine, vers une ville qui ne comptait que 20 000 habitants à l’époque. « Le Canada en a toujours fait plus. […] Il ne s’agit pas de politique. Il s’agit d’être le pays que nous avons toujours été dans le passé », a martelé le chef libéral. Les provinces, les villes et les Canadiens demandent aujourd’hui qu’Ottawa en fasse davantage pour accueillir les réfugiés quittant l’Irak et la Syrie. « Et ce gouvernement traîne de la patte pour ne pas en faire plus ».

Dans les premières mesures qu’il annonce il y a l’accueil de 25 000 réfugiés syriens. Il retirera les avions canadiens engagés contre DAESH. Non qu’il abandonne la lutte contre cet islamisme radical, mais parce qu’il estime qu’il faut plutôt former les troupes locales pour qu’elles-mêmes mènent les combats sur le terrain. « Parce que [la participation des] armées occidentales, ça finit toujours par empirer la situation ».

Malgré l’étiquette libérale – fortement connotée péjorativement dans l’hexagone – Justin Trudeau et son parti semblent décidés à s’engager dans une politique de gauche. Une politique qui rende enfin un minimum de justice aux Premières Nations, les amérindiens. Une politique qui tienne compte de la lutte contre les changements climatiques. Une politique de redistribution sociale.

 

 

Pour compléter :

Ici-radio-Canada

Quebec Huffington Post

Le Devoir

 

+ l'article du Courrier International signalé par "ti"

Résultats des élections à la chambre des communes du Canada 2015

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19 juillet 2012 4 19 /07 /juillet /2012 16:12

Marijuana

Si le Brésil et l’Argentine captent quelques rares fois notre attention hexagonale, aucun média ne fait grand cas du discret voisin, l’Uruguay. Et pourtant, les Uruguayens ont toujours été les plus sensés et les plus avancés du monde hispanique. Ainsi furent-ils les premiers à instaurer le vote des femmes et l’éducation laïque et gratuite. Leur législation sur le divorce a 70 ans d’avance sur celle de l’Espagne*. Et maintenant, ils vont légaliser la marihuana !

 

La mesure a pour partie une cause économique. Dans ce pays, la marihuana rapporte près de 75 millions de dollars par an qui vont intégralement dans les poches des mafias. Na vaudrait-il pas mieux que cette somme profite aux paysans qui cultiveraient légalement le cannabis et paieraient des impôts ?

Scandaleux ? L’alcoolisme sévit aussi. Mais personne n’envisage d’arracher nos beaux vignobles en France ou de fermer les distilleries de whisky en Ecosse ! D’ailleurs tous les buveurs ne sont pas alcooliques. Et la prohibition aux Etats-Unis a eu des effets si désastreux qu’il a fallu revenir sur cette mesure.

 

Mais l’objectif principal de la légalisation est d’améliorer la sécurité. A l’instar de la Cosa Nostra étasunienne, les trafiquants de drogue ont de l’argent et des armes ; ils corrompent tout ce qu’ils approchent et déclenchent autour d’eux un grand nombre d’actions illégales. Il suffit de jeter un coup d’œil sur la région pour juger des dégâts du trafic : une guérilla endémique en Colombie, des gangs d’adolescents sauvages en Amérique centrale (maras), une guerre avec 50 000 morts au Mexique.

 

La guerre contre la drogue : un échec retentissant !

L’échec de la guerre contre la drogue est si retentissant qu’un ex-président du Mexique, Vincente Fox, des présidents en exercice comme Juan Manuel Santos en Colombie ou le guatémaltèque Otto Pérez Molina, un éminent intellectuel comme Mario Vargas Llosa, peu suspects d’être des hippies attardés, se sont prononcés pour la dépénalisation. L’argument de toutes ces personnalités est purement pragmatique : il est absurde que meurent des dizaines de milliers de personnes parce que des dizaines de milliers d’autres cherchent des paradis artificiels. Sans aucun doute le remède de la prohibition est pire que le mal. Et il est logique de commencer par la marihuana pour explorer de nouvelles stratégies face à la drogue.

 

En Espagne, initiative catalane, des associations de fumeurs se sont formées qui apprennent comment produire du cannabis pour son autoconsommation dans le cadre de la tolérance légale de 72 g par mois. Ainsi leurs membres cessent de financer les trafiquants. Et à Barcelone s’est ouvert un musée du cannabis où l’on prétend que Shakespeare fumait des joints et que la bible recommandait la marihuana !

 

Le but de ces initiatives n’est pas de promouvoir les addictions. L’objectif est de séparer la drogue des armes (il faut noter que le pays le plus gros consommateur du monde, les Etats-unis, est celui où les armes sont totalement légales). La consommation de drogues peut être un problème grave, mais un problème qui relève de la santé publique, pas de la police et encore moins de l’armée.

 

Les uruguayens ont toujours été à l’avant-garde**, tôt ou tard de nombreux pays lui emboîteront le pas.

 

 

roncagliolo  D’après Santiago Roncagliolo  Hora de legalizar

 

* L’instauration de l’enseignement laïque et gratuit, de la séparation de l’église et de l’état en Uruguay datent de la présidence démocratique de José Batlle y Ordoňez (1903-1915) ; le divorce n’a été légalisé en Espagne qu’en 1981. 

** L’écrivain péruvien a une vision un peu édénique de l’histoire de l’Uruguay qui a connu dans les années 70 des escadrons de la mort et une dictature militaire.

 

NB  Cet article ne se veut pas une traduction de celui se S. Roncagliolo, mais une interprétation avec l'espoir qu'elle soit fidèle à l'esprit du texte. Les hispanistes se reporteront au texte original, paru aussi dans El Pais (supplément semanal) du 15/07/12.

 

Cannabis en vente libre : une première mondiale

http://www.courrierinternational.com/une/uruguay-cannabis-en-vente-libre-une-premiere-mondiale?utm_campaign=Echobox&utm_medium=Social&utm_source=Twitter

 

 

Sur le même sujet : Légalisation du cannabis, sujet tabou ? et Cécile, fais tourner le oinge !

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8 juin 2012 5 08 /06 /juin /2012 18:09

Une quiche vert bobo peut-elle poser une question pertinente ? La réponse est oui, on ouvre l’enveloppe and the winner is… Cécile Duflot !

 

 

La question sur le cannabis vient tout au début de l'entretien

 

Que la ministre du Logement soit dévorée d’ego et de « télé-addiction » en fait un être politique normal. Qu’elle flingue son gouvernement avant législatives sans se faire virer sur le champ montre la fragilité de accord électoral PS-EELV. Pourquoi parler du cannabis et de sa légalisation, en provoquant un bal des faux culs tous partis confondus ? Par le goût de se montrer à son public néo-baba ? Peu importe. La question mérite examen, même si elle n’est pas vitale politiquement.

Que veut dire « légalisation » du cannabis ? Quelle différence avec « dépénalisation » ? Si son commerce était légal, vendeurs et acheteurs ne seraient pas poursuivis ? L’état français s’attribuerait l’autorisation et la taxation du produit, comme pour l’alcool, le tabac et les médicaments ? Ou délèguerait-t-il le commerce au privé, comme dans les « coffee shops » néerlandais, d’ailleurs remis en question ? Mais qui achèterait le cannabis, et à qui ? Qui le conditionne et le met en vente ? Qui en fixe le prix TTC ? Qui en contrôle les effets sanitaires et les fraudes ?

 

QUESTION DE QUALITÉ

 

Il y a au moins deux aspects : la morale et la réalité. Pour le premier, quasi-unanimisme : la drogue est mauvaise. Sauf celle qui est autorisée et chère : tabac, alcool, psychotropes, graisses saturées, glucides et régimes à la con, qui  font partie « under control »  du monde officiel et rentable.

kif_champsenterrasse.jpg

Cultures en terrasse dans le Rif

 

 

Le cannabis est-il plus mauvais pour la santé ? Les professionnels de la profession disent oui. Je ne sais pas. Après avoir consommé pendant plusieurs années, et quotidiennement, du kif marocain, je m’estime à un degré de dégradation mentale compatible avec la moyenne nationale (française, évidemment). J’ai arrêté pour ne pas finir ruiné, les prix français m’étant hors de portée pour un produit correct. Évidence méconnue : la mauvaise qualité n’est pas bonne. Ce qui est vrai pour les hamburgers et le poisson pané l’est pour le cannabis, la cocaïne et le reste. Comment assurer la qualité dans la clandestinité ? La réponse de Guéant et Valls est abstinence et répression. What else, dit le (dangereux) café Clooney, au prix exorbitant.

 

UN BOULOT COMME LES AUTRES ?

 

Policièrement, c’est intéressant. Les centaines de keufs qui passent du temps à choper quelques barrettes de shit pour les refiler ensuite à leurs indics (politique du chiffre oblige !), seraient mieux employés dans le vrai renseignement judiciaire, comme les braquages de transports de fonds ou l’anti-terrorisme.

Socialement, ça se discute. Si on légalise la vente du cannabis, avec ou sans monopole d’État, comment vont se nourrir les milliers de familles qui vivent du trafic, entre les gamins qui font les « choufs », les cousins qui dealent et les mamans qui font les paquets ? Une anecdote : dans les années 90, les flics kif-vente.jpgsaisissent près d’une tonne de shit dans une cité de Saint-Denis 93. Les jours suivants, des dizaines de mères de famille sans ressources officielles squattent le bureau d’aide sociale de la mairie pour demander des secours, en cash et tout de suite. Les flics ont arrêté le massacre, à la demande officieuse des élus. Le chômage et la déqualification étaient déjà là.

Autre question sociale, l’aggravation potentielle des trafics. Les dealers de cannabis vont-ils se recycler avec enthousiasme dans la formation professionnelle pour toucher peut-être le Smic en conduisant un chariot chez Auchan, après avoir gagné 150 euros par jour en matant les entrées de cité ? Ou vont-ils se convertir à des activités plus rentables comme le trafic d’organes humains, de Kalashnikov, de putes moldaves ou nigérianes, déjà existantes mais moins développées, ou même de coke fumable et de molécules de synthèse, beaucoup plus dangereuses (et chères) que le shit ?

 

 

 

MORT AUX IRRESPONSABLES !

 

Sur le fond, l’interdiction est aujourd’hui une vision de société. Nous devons beaucoup à toutes les bonnes âmes, droite et gauche mêlées, qui veulent le bonheur du peuple volens nolens, citant à tout va mai 68, l’amour de la vie, l’éducation des enfants, la croissance non productiviste et le principe de précaution. Vous ne vous rendez pas compte que vous avez dépassé les 130 km/h sur autoroute par temps sec et faible trafic ? Trois points en moins, misérable déviant ! Vous avez consommé chez vous et sans modération une bouteille de Chablis sans penser à l’exemple désastreux que vous donnez à vos enfants ? Honte à vous, père indigne ! Étonnez-vous si vous en faites des drogués ! À moins de tuer préalablement votre famille par tabagisme passif !

Vous avez des problèmes de nerfs et de sommeil ? Prenez des benzodiazépines, légales et remboursées ! Ce n’est pas comme votre cannabis, qui détruit les neurones en rendant euphorique ! Vous avez lu « Le nom de la rose » ? Vous avez compris que le rire et la joie sont la mort de la morale sociale ?

Dans le papier « Légalisation du cannabis, sujet tabou ? », à côté d’éléments pertinents, je ne partage pas la proposition « de réunir, dans un climat politique serein, des commissions de consensus* » pour discuter de tout ça. Quand a-t-on vu pour la dernière fois un tel climat ? Plus grave, qui sont les membres de cette commission qui vont décider de ce que je peux fumer, boire, ingérer et penser ? Je revendique la liberté d’information, qui m’avertira si je le souhaite des risques encourus dans l’état actuel de la science. Je revendique la liberté de pensée et d’action, si je ne porte préjudice à personne. Un fait me rassure : les Khmers verts, végétariens buveurs d’eau, moralistes implacables, finissent par mourir, et pas forcément centenaires. C’est rassurant.

 

Gilbert Dubant

 

* Note du déblogueur : Pour le moment, la consommation de cannabis est - en principe - prohibée, donc une commission de consensus tentant de faire des propositions sur ce sujet ne peut pas faire "pire" que de maintenir le statu quo et, au "mieux" permettre, sans l'imposer bien sûr, la consommation d'un produit aujourd'hui interdite. Mais de telles commissions pourraient aussi se pencher sur d'autres questions de société, comme les "mères porteuses", l'euthanasie, qui, pour le moment, ne donnent lieu qu'à des échanges caricaturaux

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Nota Bene

Le deblog-notes, même si les articles "politiques" dominent, essaie de ne pas s'y limiter, avec aussi le reflet de lectures (rubrique MLF tenue le plus souvent par MFL), des découvertes d'artistes ou dessinateurs le plus souvent érotiques, des contributions aux tonalités diverses,etc. Pour les articles que je rédige, ils donnent un point de vue : les commentaires sont les bienvenus, mais je me donne bien sûr le droit d'y répondre.

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Nelle Formule

Overblog - hébergeur du deblog-notes - a réussi l'exploit de lancer une nouvelle formule qui fait perdre des fonctions essentielles de la version précédente. Ainsi des liens vers des sites extérieurs disparaissent (désolé pour  Koppera, cabinet de curiosités, ..). Les albums se sont transformés en diaporamas, avec des cadrages coupeurs de têtes. La gestion des abonnés et des commentaires est aussi transparente que le patrimoine de Copé. Et toutes les fonctions de suivi du deblog-notes - statistiques notamment - sont appauvries.